« Bien sûr, j’ai eu le sentiment de me pervertir en faisant ça » dit Olivia Ruiz à propos de la Star Academy, tout en racontant à longueur d’interview combien son passage dans cette émission l’a desservie. Car Olivia n’est pas un produit de la télé réalité, elle est rebelle, elle a des choses à dire. Et au moment où on commençait à la croire, à trouver courageux la manière dont elle s’est battue pour se débarrasser d’une supposée étiquette en forme de code-barre, qui voit-on vanter à longueur de couloirs de métro Coca-Cola Light ? La même petite victime de la société de consommation et de loisir, tout sourire.
Alors soit Mlle Ruiz est masochiste, ce qui n’est pas un défaut – une névrose au pire -, soit elle est dangereusement paradoxale.
Dangereusement en ce qu’elle est le reflet d’une certaine jeunesse en manque de principes, capable d’idolâtrer Nicolas Hulot tout en roulant en 4×4 et en installant des convecteurs électriques, capable de prendre position pour les sans-papiers tout en faisant ses courses en grande surface (qui pressurent honteusement leurs salariés les plus précaires, faut-il le rappeler), capable de défendre le commerce équitable au cours de dîners bobos aux Abbesses tout en se vendant à Coca-Cola.
Cette génération semble incapable de relier les faits entre eux, d’établir des liens de cause à effet, de comprendre, en un mot, que tout est lié et que nous avons chacun un devoir d’exemplarité en mettant en accord nos discours et le moindre des actes de notre vie quotidienne. Il est facile de brocarder Jacques Chirac se posant en héraut de la justice, alors qu’il est de notoriété publique que l’homme est un margoulin de classe mondiale ; mais nul ne peut s’arroger ce droit s’il n’est exempt de tout reproche. Si vous téléchargez illégalement de la musique, si vous faites jouer vos relations pour ne pas payer un PV, si vous mentez sur votre déclaration de revenus, vous êtes à classer dans la même catégorie que notre futur ex-président. D’ailleurs, le fait que Nicolas Sarkozy ait profité de sa position de maire de Neuilly pour faire de la spéculation immobilière ne semble pas émouvoir grand monde au pays de Robespierre et Saint-Just, alors qu’il me semble que ce monsieur devrait d’office être inéligible.
« Chaque jour sur terre, les hommes s’assument de moins en moins
Que peuvent-ils encore faire pour mieux éclairer nos destins
Leurs desseins sont clairs, c’est le billet vert, la bourse des vauriens
Et le monde des affaires, qui chaque jour s’affaire, les autres ça fait rien » chante Olivia Ruiz dans Qui sommes-nous ?, avant de demander en fin de refrain « Qu’attendons-nous ? »
On attend que vous nous montriez la voie, Olivia. C’est en partie le rôle d’un artiste (cf Albert Camus, L’homme révolté)
Non ?
Un commentaire
Oui, nous sommes tous ou presque tous, esprits avisés ou pas, pétris de contradiction. Entre vœux pieux, idéal, aspirations et pratique du quotidien, face aux réalités du moment, on tente de tracer sa route en se donnant bonne conscience avec ses « dires » plus qu’avec ses « faire ».
L’important reste l’enthousiasme qui nous fait nous extasier un instant pour ce qui est créatif inspiré par les lis éternelles du Beau, du Bon, du Vrai.
Salutations d’un voisin mirebalais…